Catégories
L'usine

L’usine (3)

Des ouvrières veillent sur le stock de leur usine de peur qu’il ne disparaisse alors que leur dernier salaire n’a pas été versé.

Elles veillent sur le stock
Elles veillent sur le stock

Vers deux heures du matin le sommeil ne faisait plus effet. Ma bicyclette m’emmena avec des bouteilles d’eau et des biscuits jusque devant l’usine au toit rouge nommée ainsi en raison de sa particularité. Dans les alentours du parc industriel Vattanac, du nom d’une banque locale, tous les toits sont bleus, sauf un. Et puis les ouvriers ne connaissent pas toujours le nom de leur usine, soit parce qu’il n’est indiqué nulle part, soit parce qu’il est écrit en Chinois ou en caractères latins. Il faut bien trouver quelque chose pour désigner le lieu où l’on travaille… L’atmosphère s’était nettement refroidie malgré les feux allumés à gauche à droite. Le réconfort apporté aux veilleurs fut apprécié. Ils étaient harcelés par de fort nombreux moustiques. Certains étaient enroulés dans des couvertures et essayaient péniblement de dormir un peu sur les étals vides des commerçants qui fournissent, au bord de la chaussée, devant les usines, à ceux qui en sortent, ce dont ils ont besoin. Devant le portail arrière de l’usine ils étaient encore plus nombreux. Certains trouvaient la force de jouer à des jeux de plein-air, qui habituellement se jouent exclusivement durant la période du nouvel an soit mi-avril, bien que cette coutume ancestrale ait tendance à disparaître sans que personne ne puisse dire pourquoi.

Extrait du livre

Par Yann D

Le choix de Yann DEFOND pour la vie en tant que fils d’ouvrier et chrétien est de partager l’existence des travailleurs qui habitent le plus grand quartier ouvrier du Cambodge en solidarité. Il a d’ailleurs lui-même travaillé en usine, dans l’industrie graphique, en France, son pays natal.
Son témoignage en cours d'écriture relate donc ce qu’il peut observer auprès des jeunes femmes qui cousent jour après jour bon nombre des vêtements que portent les européens. Quelques réflexions et autres notices autobiographiques agrémentent ce texte dans lequel il évite humblement d’employer le pronom personnel sujet de la première personne du singulier pour parler de lui.

Laisser un commentaire