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Des jeunes en mouvement

Le rassemblement du 22 mai à Phnom Penh

Article rédigé en 2005 alors que j’étais en mission de coopération pour le vicariat apostolique de Phnom Penh envoyé auprès des ouvriers de la confection textile.

Pour la première fois le 1° mai 2005, jour de la Saint Joseph patron des travailleurs et sous l’impulsion de la visite du Père John Marsland aumônier de la Coordination Internationale des Jeunesses Ouvrières Chrétiennes (Rome), les responsables des équipes de jeunes travailleurs que j’accompagne se sont retrouvés ensemble.

Les équipes se sont réparties les tâches : faire les courses, faire la cuisine, chercher de l’argent, préparer le temps de prière, les jeux, la salle, l’animation, réaliser les invitations, chercher des voitures pour le transport…

L’équipe des apprentis a cherché du matériel pour organiser l’événement dans son foyer : bâches, sono, casseroles, assiettes, nattes… Sokhchéa, lui, a préparé le temps de présentation de la démarche de révision de vie. L’équipe de Sophoas s’occupa de l’animation. Sophi et Sophoan préparèrent la prière.
Mon rôle était de les aider, voir de les inciter.

Finalement le dimanche 22 mai au matin tout a commencé avec le temps de prière. Lors du déjeuner le nombre d’assiettes, de couverts, etc… était très juste. « La viande n’était pas bonne et c’était trop salé » se plaignait Sophoas. Le programme de l’après-midi a tardé à être lancé. C’est peut-être ce qui a poussé une bonne vingtaine de jeunes à partir. Certains travaillaient de nuit, d’autres étaient malades, d’autres encore avaient prévenu qu’ils étaient occupés. Plus inquiétant, des apprentis se sont réfugiés dans leurs chambres. « Certains sont allés dans leur chambre car ils ne s’amusaient pas » expliqua Naré. Un groupe d’ouvriers du bâtiment est rentré car « ils ne savaient pas parler avec les autres ». Il faut dire qu’ils sont arrivés de la province de Kompong Speu il y a seulement 1 mois. « Ceux qui sont restés ont compris, ils reviendrons » se consolait Sophoas.


Au bout d’un moment les responsables d’équipe se sont présentés puis ont distribué à 5 groupes un texte puzzle à reconstituer. Ensuite des volontaires ont lu à haute voix le texte qui expliquait la révision de vie.
Sokhchéa et Sophoas ont alors vaguement expliqué comment et pourquoi chaque équipe se réunit une fois par mois. Alors que ce n’était pas prévu, ils ont donné la parole aux invités. Une dizaine d’entre eux ont tour à tour pris la parole pour partager les difficultés qu’ils rencontraient dans leur vie de tous les jours. La journée s’est terminée par des jeux. Faute de musique, personne ne dansa. « C’était surtout les garçons qui étaient déçus » précisa Srey Mao, ouvrière dans le sud de Phnom Penh.

Le rassemblement en chiffres : 130 invitations furent données de la main à la main. 80 jeunes travailleurs y ont participé dont 18 en équipe de révision de vie (sur 23). Sur les 80 jeunes, 24 étaient des baptisés (30%). Il y avait 30 garçons pour 50 filles; 43 ouvriers de la confection textile dont 38 jeunes femmes (89%). 5 adultes étaient aussi présents.

« Lorsque je suis faible, c’est alors que suis fort » (2 Co 12, 10)
Ce rassemblement n’avait rien de triomphant. « Il n’y avait pas d’ambiance festive » déplora Liet, apprentis. Mais les jeunes l’ont préparés avec leurs (petits) moyens, avec ce qu’ils sont. Peut-être qu’à travers leurs difficultés on pouvait entrevoir ce Jésus crucifié qui manifeste une puissance autre. Malgré la mauvaise organisation, à la fin l’ambiance était chaleureuse. C’était vraiment -leur- fête. D’ailleurs durant la journée, ils n’ont pas eu besoin de moi, si ce n’est pour combler l’étroitesse du budget.
« Nous n’avions pas d’argent! » s’exclamait Naré. Ils étaient partis sur un budget de plus de 100 $. Finalement ils ont recueillis 60 $. Une participation financière devait être demandée aux participants mais aux vus du déroulement de la journée, personne n’a osé récolter l’argent. Très peu ont donné. Cependant cela n’empêcha pas Sokhchéa de déclarer : « nous avions peu d’argent mais nous avons pu échanger et Jésus était là. »

Article publié dans CIJOC online 1

Par Yann D

Le choix de Yann DEFOND pour la vie en tant que fils d’ouvrier et chrétien est de partager l’existence des travailleurs qui habitent le plus grand quartier ouvrier du Cambodge en solidarité. Il a d’ailleurs lui-même travaillé en usine, dans l’industrie graphique, en France, son pays natal.
Son témoignage en cours d'écriture relate donc ce qu’il peut observer auprès des jeunes femmes qui cousent jour après jour bon nombre des vêtements que portent les européens. Quelques réflexions et autres notices autobiographiques agrémentent ce texte dans lequel il évite humblement d’employer le pronom personnel sujet de la première personne du singulier pour parler de lui.

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