Yann DEFOND est un immigré français vivant à Phnom Penh depuis 20 ans. […] Il a choisi de partager la vie de la population ouvrière de l’habillement au Cambodge. De formation artistique, il exerce des activités de comédien, journaliste et interprète.
Les couleurs étaient vives ce qui enthousiasmait les voisins. Cependant, en même temps, ils se demandaient « A quoi cela sert-il de tout repeindre ? Il n’est pas le propriétaire et quand il partira tout reviendra à un autre. » Mais pourquoi partir ? C’est pour la vie…
Je ne suis pas fils de peintre en bâtiment pour rien !
A l’office personne ne trouve la clé du ក-47 (le ក [kɒ:] est la première lettre de l’alphabet khmer et désigne ici l’allée). Par chance les volets sont restés ouverts alors avec Sophéap et son amie ouvrière d’une usine d’habillement comme elle, nous regardons à l’intérieur. Quoi qu’il en soit toutes les habitations de la cité sont identiques. La saleté imprègne les murs. Qu’à cela ne tienne, mon père était peintre en bâtiment alors, refaire toute la peinture ne m’effraie guère. « Dès que vous paierez la caution nous retrouverons les clés. »
5 juillet 2009, retour dans cette cité ouvrière enfermée entre quatre murs, un peu comme la palissade du village d’Astérix. Une visite quatre ans plus tôt m’avait marqué : « Pour des habitations destinées à des travailleurs, c’est assez spacieux. » Nous sommes un dimanche et ce n’est sans doute pas un hasard ; sur huit cent quarante-cinq studios, un seul est disponible. Non pas deux, cinq ou dix ; un seul. « Il vous précède en Galilée » (Matthieu 28, 10). D’habitude les co-locataires se renouvellent sans cesse. Ils se relaient, ce qui a pour effet de ne jamais laisser de location libre.